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Le Lindigo soley

À peine rentré de tournée, Olivier Araste nous accueille dans sa cour pour nous faire écouter le master de Komsa Gayar, sixième album de Lindigo qui sortira en novembre en étendant son Maloya Power jusqu’aux Amériques latines. Après cinq disques à se justifier face aux sempiternels puristes, le leader débonnaire confirme sa volonté d’être un musicien au sens large et laisse derrière lui les combats de ceux qui voudrait l’estampiller « maloyèr épicétou ».

« C’est pas une enceinte Marshall, c’est une Marche mal. » pouffe Olivier Araste pendant qu’il bidouille les branchements d’une tablette sur une baffle posée sur un tabouret à l’équilibre précaire. Pour la première fois, ses nouvelles chansons passeront dans des oreilles extérieures. Malgré sa légendaire décontraction, c’est une étape qui, immanquablement, donne l’impression de se mettre à nu.

Pendant qu’il se dépatouille avec son câblage, profitons-en pour resituer Komsa Gayar dans la discographie du groupe du quartier de Paniandy. Trois ans après Milé sèk milé, album coup de poing brandi à la face des puristes d’un maloya supposément inaltérable, Araste, lors d’une tournée qui l’emmène à Cuba, rencontre les Muñequitos de Matanzas, sympathique groupe de guaguanco, un sous-genre de la rumba. Il ne parle que cinq mots d’espagnol, et alors ? C’est l’opportunité de se jouer d’autant plus des frontières musicales et d’enfoncer le clou de sa réputation de touche-à-tout qui ne brille jamais autant qu’hors de sa zone de confort.

Après le métal avec Warfield, le dub et l’afrobeat au fil de Milé sèk milé et la trance avec Fixi (Java, Winston McAnnuf) et Cyril Atef (-M-) dans la formation Pachibaba, le colosse aux tresses plaquées a fini de rendre des comptes à l’intelligentsia musicale pour laisser place à une fiesta internationale qui fait secouer les postérieurs sur de la dance brésilienne pleine de fièvre, de la rumba cubaine mais aussi sur les gimmicks qu’il assume pleinement.

C’EST COMME D’HAB ET C’EST DIFFÉRENT

Oui, certains titres (comme Somin la kaz) n’ont que quatre phrases martelées en boucle. Mais on se voit déjà les clamer jusqu’au final aux allures de transe qui, à la trinité des instruments maloya incontournables, invite les beats électroniques dans une superbe cacophonie.

Oui, l’habituel morceau en malgache vient encore faire la nique aux puristes qui crient au blasphème. On y trouve même un autre en espagnol (niveau premières pages d’Assimil) parce que ¿ porqué no ?

Oui, on y trouve encore des textes simples que les détracteurs jugent simplistes parce que, oui, Olivier F-ing Araste est toujours sèk i lé : un artiste hypersociable (pour ce dernier album, en plus des cubains, il a invité Danyel Waro et les sudafs de Skip & Die) attaché à ses racines (son marmay est aussi en feat) et un alchimiste musical, un coupeur de canne qui constate les travers de la mondialisation et un showman qui embras(s)e à 100% la mondialité.

Oui, oui, oui et encore trois fois oui mais plus encore. Pour Komsa gayar, il compose San ou, son premier morceau sentimental dédié à sa femme qui reste à Paniandy quand Lindigo part en tournée. Le quartier de Bras Panon lui-même est à l’honneur dans un titre qui envoie du street (et des extraits de course automobile urbaine) à grands coups de décibels. Parce qu’un nouvel album de Lindigo fait toujours beaucoup de bruit.

Camicii