
Le souffle de Ziia
Ziia sort "Second Wind", un maxi soul nickel et s’apprête à voyager en Afrique du Sud, où elle vient de trouver un producteur. Rencontre avec une artiste à l’univers singulier.
Voix puissante, rauque et sensuelle. C’est la marque de fabrique de Ziia, dont on avait dit le plus grand bien dans la dernière édition papier de L’Azenda (juin 2012). A la veille de l’été, la jeune artiste établie sur l’île de La Réunion sort un maxi, qui donne une excellente idée de l’étendue de son talent. Alors forcément, au-delà de l’écoute de ses ballades très soul, on a voulu la rencontrer pour vous faire découvrir son univers singulier et indéniablement prometteur.
Peux-tu, Ziia, nous présenter ton opus, Second Wind, sorti en juin 2012 ? Ce n’est pas un album. C’est un maxi. Il y a cinq compositions, une reprise avec Titouan, et deux interludes. Ca peut porter à confusion, parce que les gens peuvent imaginer que c’est un petit album, mais ce n’est pas le cas. Et j’espère que mon album sera, lui, beaucoup plus long. Cela faisait en tout cas longtemps que j’avais envie de graver sur disque ce que je fais. Comme je suis peu sûr de moi dans le montage de projet, j’avais besoin de fixer les choses, de façon à avoir une référence qui dise mieux mon style musical. En fait, je veux montrer par ce maxi ce que je sais faire, et si possible séduire des professionnels, qu’ils soient musiciens ou programmateurs.
Durant l’IOMMA (Indian Ocean Music Market), tu as rencontré un producteur... Oui, un producteur sud-africain, de Johannesburg. Une belle rencontre humaine. Et finalement, il m’invite en Afrique du Sud, en octobre prochain, pour rencontrer Isabel Novela, du Mozambique, qui sort son album chez lui dans les mois qui viennent. Et, je ne te cache pas que ces collaborations vers l’Afrique du Sud me satisfont beaucoup.
Si je ne devais garder qu’une chanson, je garderais la dernière, particulièrement bien arrangée. Oui, il y a plusieurs raisons à cela : c’est la seule qui n’a pas été enregistrée dans un esprit acoustique, je voulais qu’elle pète. De plus, elle n’a pas été faite en même temps que les autres, mais bien avant. Et puis c’est un morceau assez soul dans lequel j’essaie d’être vocalement très présente. En tout cas, l’ambiance générale de l’album est assez afro : j’aime utiliser la voix comme un cuivre.
Tes premiers pas dans la musique ? Je suis autodidacte, même si j’ai toujours fait de la musique. Mais je ne m’étais jusqu’alors jamais autorisée l’idée que ça puisse prendre plus de place dans ma vie. Et je suis arrivée à La Réunion avec une guitare, alors qu’avant je pratiquais le piano, et j’ai passé trois ans assez seule, à apprendre à composer plein de choses. A la suite de cela, j’ai rencontré des musiciens, j’ai joué chez les gens, malgré ma pudeur. Une communauté de musiciens, dans le sud, s’est offerte à moi, et très vite, j’ai eu différentes formules à partir de 2008 (avec, notamment, un choriste, puis avec un saxophoniste et un pianiste), et ça interpellait... A cause de ta voix, parce que tu as une voix très singulière... Oui, à cause de la voix, surtout. Mais aussi parce que je ré-arrangeais de façon vraiment très différente les reprises que je faisais. Du coup, les musiciens étaient intéressés par mon style musical assez simple et épuré, ce qui donne quelque chose de souvent personnel et, disons, chaud. Du coup, j’ai joué avec plein de monde... Et puis, en parallèle, je rencontre Gilou, du groupe Tribaloya, qui n’existait pas encore. On est sur la même longueur d’onde, car on a la même histoire musicale, tous deux autodidactes. Finalement je fais tous les cœurs de l’album au moment de la naissance de Tribaloya... Et moi qui ai toujours rêvé d’être choriste-instrumentiste, je me trouve embarqué dans cette aventure, avec Jérémie Lapra, Didier « Captain » Ringot, Youric Delacuvellerie, notamment. Et on fait deux tournées en France. Le rêve.
Tes influences ? C’est la soul musique. Et la musique black. Beaucoup d’afrobeat. Et puis Dire Straits. Et bien sûr Zap Mama. Je suis plus une amoureuse des sons et de la musique que des textes. C’est sans doute pour ça que la composition de la musique est toujours préalable à l’écriture des textes. J’écris parce qu’il faut, mais je ne me sens pas auteur. Je trouve ça délicat, les mots. J’entends la voix comme une émotion, au-delà du sens du mot.
Et pourquoi ce titre, Second Wind ? Parce qu’il raconte le second souffle que j’ai pris dans ma vie depuis que je suis à La Réunion.
Sur cette galette, tu retrouves Titouan, ton acolyte. J’ai l’impression qu’il te met en confiance... Oui, ça été un vrai échange humain, car il a toujours été dans des formations très festives. Or, moi, je lui proposais soudain des compositions beaucoup plus intimes et davantage portées sur l’émotion. Je pense que ça l’a séduit parce qu’il a cela en lui, j’en suis convaincue, et qu’il n’avait pas eu l’occasion de proposer ce genre d’univers musical. Et moi, je suis pudique, et il m’a amené cette ouverture sur les autres. Bref, ces deux personnalités ont finalement accroché les gens.
Propos recueillis par Nicolas Millet